Pourquoi les étudiants serbes s’engagent-ils dans une lutte contre la corruption et la crise politique à Belgrade ?


**Titre : La révolte des étudiants serbes : un écho aux luttes historiques face à la corruption institutionnelle**

Dans la nuit du 10 au 11 mars 2025, des centaines d’étudiants en Serbie ont bloqué les locaux de la chaîne de télévision et de radio publiques, la RTS, à Belgrade, révélant ainsi l’intensité croissante d’un mouvement populaire né de la colère contre la corruption et l’incompétence des autorités. Cette action symbolique, bien que ponctuelle, s’inscrit dans une tradition plus vaste de contention citoyenne dans les Balkans, faisant résonner des échos de luttes passées tout en illustrant les défis contemporains auxquels fait face cette région troublée.

### Une révolte enracinée dans l’histoire

L’élément déclencheur de cette nouvelle vague de manifestations est le traitement médiatique, jugé dégradant et biaisé, réservé au mouvement étudiant par certains journalistes de la RTS. En désignant les manifestants par le terme péjoratif « horde » lors d’une intervention présidentielle, il est apparu que le gouvernement contribue à la déshumanisation d’un mouvement qui, en réalité, tire ses racines des profondes inégalités et de la détérioration des conditions de vie des jeunes Serbes.

Historiquement, la Serbie a connu de nombreux épisodes de résistance contre des régimes jugés oppressifs. Des mobilisations comme celles de l’OTAN en 1999 aux révolutions de l’économie de marché des années 2000, les jeunes ont souvent été en première ligne pour revendiquer un changement. Ce blocage de la RTS marque ainsi la continuité d’une lutte de plusieurs décennies, où l’une des plus grandes préoccupations reste le manque de transparence dans la gestion de l’État.

### La tragédie de Novi Sad : un catalyseur de tensions

L’incident tragique de l’effondrement de la gare de Novi Sad, survenu en novembre dernier et ayant coûté la vie à quinze personnes, dont deux enfants, agit comme un catalyseur sur ces problèmes structurels non résolus. Le sentiment que ce drame est le reflet d’une corruption systémique et d’une négligence dans les politiques publiques alimente et exacerbe la colère des étudiants. Dans une société où la confiance en les institutions s’étiole, ces jeunes citoyens, fervents défenseurs de la démocratie, se dressent contre un climat d’impunité.

### Un mouvement aux multiples visages

Le mouvement étudiant en Serbie est bien plus qu’une simple réaction à un incident précis ; il est un reflet d’une insatisfaction croissante envers un système qui semble favoriser les intérêts privés au détriment de l’intérêt public. Ce phénomène s’observe également dans d’autres pays des Balkans, tels que la Bosnie-Herzégovine et le Monténégro, où la jeunesse manifeste des préoccupations similaires face à la corruption institutionnelle.

Les résultats d’un récent sondage mené par des chercheurs indépendants révèlent que 67 % des jeunes Serbes estiment que le système politique est corrompu et que 58 % d’entre eux envisagent de quitter le pays pour chercher de meilleures opportunités à l’étranger. Ces chiffres soulignent un désenchantement général et un appel à une véritable réforme des structures politiques.

### Un avenir incertain

Face au refus des autorités d’admettre leur responsabilité dans les récents événements, le président Aleksandar Vucic tente de désamorcer les tensions en proposant le dialogue tout en insinuant qu’une « révolution de couleur » est fomentée par des acteurs extérieurs. Cette stratégie vise à discréditer le mouvement étudiant et à détourner l’attention des véritables enjeux sous-jacents que sont la corruption et la mauvaise gouvernance.

Les manifestations actuelles soulèvent des questions cruciales sur l’avenir politique et social de la Serbie. L’émergence d’un mouvement étudiant uni, déterminé à contester le statu quo, rappelle l’importance de l’engagement civique dans la construction d’une société plus juste. La RTS, en tant qu’institution publique, devrait prendre conscience de son rôle dans cette dynamique et s’efforcer d’être un acteur de changement plutôt que de se positionner comme un instrument de propagande.

### Conclusion : vers un changement durable ?

La mobilisation des étudiants serbes met en exergue un besoin urgent d’un climat démocratique sain et d’une réforme institutionnelle profonde. Alors que le mouvement s’efforce de donner une voix à ceux qui se sentent invisibles, il nous rappelle également que l’histoire se construit à travers l’engagement des citoyens. Les étudiants de Serbie s’érigent ainsi en gardiens de la mémoire collective, portant sur leurs épaules l’espoir d’un avenir meilleur, malgré les obstacles que leur route pourrait encore réserver.

En fin de compte, que l’on parle de manifestations, de dialogues ou de conflits, l’essence de cette lutte est universelle : il s’agit de la quête inébranlable d’un espace civique où chaque voix compte et où chaque citoyen mérite d’être entendu.