**L’Interdiction des Étrangers sur le Marché de l’Or Artisanal au Ghana : Une Réflexion Nuancée**
À partir du 1er mai 2024, le Ghana, premier producteur d’or d’Afrique, mettra en œuvre une interdiction qui forcera les entreprises étrangères à quitter le marché de l’or artisanal. Cette décision, émanant du Ghana Gold Board — l’organisme public chargé de réguler le secteur aurifère — s’inscrit dans une série de mesures visant à contrer la contrebande et à maximiser les revenus liés à l’or dans un pays dont l’économie a longtemps dépendu de cette ressource précieuse.
Derrière cette annonce se cache un objectif ambitieux : garantir que les bénéfices de l’exploitation aurifère demeurent au sein de l’économie nationale. Selon les estimations, la production dorée à partir des mines artisanales ghanéennes en 2023 aurait atteint 34 tonnes, alors que certains experts, notamment ceux de l’organisation de coopération et développement Swissaid, suggèrent que la véritable production pourrait être le double. Cela démontre un potentiel de revenus fiscaux négligés qui pourrait contribuer substantiellement à l’économie du pays, en particulier dans la stabilisation de la monnaie nationale, le cedi, qui a connu des fluctuations dramatiques ces dernières années.
Cette décision a suscité des interrogations sur ses implications non seulement pour l’économie du Ghana, mais aussi pour les centaines de milliers de personnes qui dépendent, directement ou indirectement, de cette industrie. Les sociétés chinoises, qui, selon des sources, comptent près de 50 000 travailleurs sur ces gisements, semblent être dans le viseur du gouvernement. Bien que leur présence ait été de nature stimulante pour certaines communautés rurales, elle soulève également des préoccupations concernant l’environnement, la réglementation et les droits des travailleurs.
L’exclusion des sociétés étrangères pourrait avoir des effets d’entraînement sur plusieurs fronts. D’une part, cela pourrait permettre au gouvernement de renforcer le contrôle sur les ventes et les exportations d’or, dans une tentative de réduire la fuite des capitaux. D’autre part, cela pourrait également entraîner une crise pour les mineurs artisanaux qui, sans l’aide de partenaires étrangers, pourraient se retrouver avec moins de soutien en termes d’investissements et de technologies. Ces mineurs, souvent vulnérables à l’exploitation économique, pourraient voir leur situation se dégrader si il n’existe pas des alternatives viables pour soutenir leurs activités.
Le gouvernement ghanéen souligne que cette politique de « reprise en main » du secteur minier est nécessaire pour veiller au bien-être économique du pays. Toutefois, dans la recherche d’une solution durable pour le secteur, il convient de s’interroger sur la manière dont des mesures telles que l’exclusion des étrangers peuvent être équilibrées avec la nécessité d’un développement inclusif. Comment le Ghana compte-t-il soutenir les mineurs artisanaux pour qu’ils bénéficient de cette réforme ? Quelles mesures seront mises en place pour éviter les répercussions économiques sur les communautés locales ?
Il est également crucial de considérer les enjeux environnementaux qui accompagnent l’exploitation aurifère artisanale. Les critiques de l’industrie soulignent souvent que, dans un cadre non régulé, des pratiques nuisibles à l’environnement peuvent prédominer. L’interdiction pourrait donc ouvrir la voie à des pratiques plus durables si le gouvernement gère adéquatement la transition. Cela pourrait impliquer des investissements dans des méthodes d’exploitation plus respectueuses de l’environnement, et des programmes de formation pour les mineurs artisanaux afin de les aider à atteindre une plus grande durabilité et une meilleure rentabilité.
Les mesures prises par le Ghana peuvent être interprétées comme une affirmation de son autonomie économique, mais elles doivent être soigneusement calibrées pour ne pas devenir contre-productives. L’équilibre entre la nécessité de sécuriser des revenus pour le pays et celui de garantir des conditions de travail équitables et durables pour les mineurs est délicat mais essentiel.
Dans ce contexte complexe, il est impératif que toutes les parties prenantes, y compris le gouvernement, les travailleurs du secteur, les organisations non gouvernementales et les investisseurs, s’assurent que les objectifs économiques ne se font pas aux dépens des droits humains et de la durabilité environnementale. Les prochaines étapes après le 1er mai offriront sans aucun doute l’opportunité d’évaluer les effets de cette politique et de réfléchir à des solutions qui favorisent un avenir prospère et équitable pour tous au Ghana.