### La nomination de Getachew Reda : entre espoirs de réconciliation et tensions internes
La désignation récente de Getachew Reda comme Conseiller pour l’Afrique de l’Est auprès du Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed suscite des interrogations sur la profondeur des divisions politiques au sein du Tigré et de l’Éthiopie en général. Ancien cadre du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) et figure de proue dans la lutte contre le gouvernement fédéral, Reda se trouve désormais à un carrefour périlleux entre son passé de rebelle et son rôle dans un gouvernement qui a longtemps été en opposition avec le TPLF.
#### Un parcours tumultueux
Getachew Reda a joué un rôle central dans le TPLF durant la guerre du Tigré qui a débuté en novembre 2020. Sa position de numéro deux du TPLF l’a amené à être l’un des architectes de l’accord de paix de Pretoria, signé fin 2022, qui avait pour but d’instaurer une trêve après une période de conflit intense ayant causé des dégâts humains et matériels incomensurables. Cependant, alors que le processus de paix prend du temps à se mettre en œuvre, Reda a également été confronté à des accusations de complaisance à l’égard du gouvernement d’Addis-Abeba. Cette perception de compromission pose un défi considérable à sa réputation, tant auprès des membres du TPLF que de la population tigréenne en général.
#### Les divisions internes au TPLF
L’accroissement des tensions internes au TPLF est un élément majeur du contexte actuel. En mars 2025, des affrontements entre factions rivales du TPLF ont eu lieu à Mekele, la capitale régionale. D’un côté, les Forces de défense du Tigré fidèles à l’ancien président de la région, Gebremichael Debretsion, et de l’autre, une administration régionale mise en place par le pouvoir fédéral, dirigée par Getachew Reda. La passation de pouvoir qui s’est produite en mars et qui a vu Reda remplacé par un chef militaire tigréen peut être interprétée comme une tentative d’apaisement de la part du gouvernement fédéral, mais sa nomination au sein du gouvernement pourrait contrecarrer ces efforts, exacerbant les craintes d’un nouvel embrasement.
#### Une dynamique régionale complexe
Cette dynamique interne s’inscrit dans un cadre régional encore plus complexe, notamment avec l’érysht de l’Érythrée, dont le régime est suspecté d’appuyer la faction de Debretsion. Cette dimension internationale rend la situation d’autant plus délicate. Les rivalités historiques entre l’Érythrée et l’Éthiopie, ainsi que les fragilités internes au TPLF, soulèvent des questions sur la stabilité future de la région. Comment le gouvernement fédéral et les groupes tigréens peuvent-ils naviguer ces relations tendues pour instaurer un climat de paix?
#### Les enjeux de la nomination de Getachew Reda
La nomination de Reda est principalement perçue comme un geste fort de la part du gouvernement d’Abiy Ahmed, cherchant à intégrer des figures issues du TPLF au processus politique national, tout en affirmant son pouvoir en contrôlant les dynamiques au Tigré. Toutefois, cela révèle également une réponse aux craintes de fragmentation interne au sein du TPLF, où des factions rivales peuvent voir dans cette nomination une tentative de marginalisation.
Il est essentiel, dans ce contexte, de se demander quelle vision de l’avenir du Tigré et de l’Éthiopie Abiy Ahmed et son gouvernement véhiculent. La nomination de Reda pourrait être interprétée comme un pas vers une inclusion des voix tigréennes dans la politique nationale, mais elle pourrait aussi renforcer les soupçons et les divisions.
#### Vers un avenir incertain
L’avenir politique de l’Éthiopie et la stabilité du Tigré semblent plus précaires que jamais. Si Getachew Reda est perçu comme un pont entre le gouvernement fédéral et le TPLF, il est crucial qu’il développe une légitimité tant auprès de ses pairs qu’auprès des citoyens. La prise de risque politique est grande, et les attentes sont élevées. En somme, sa capacité à naviguer ces tensions avec empathie et intelligence pourrait être la clé d’un apaisement, tant recherché, et d’une réconciliation durable.
Cette évolution politique annonce des défis, mais aussi des opportunités. Au-delà des divisions, des voix s’élèvent pour plaider en faveur d’un dialogue constructif et inclusif, car seul un processus permettant de rassembler les différentes factions et de traiter les griefs légitimes des Tigréens pourra ouvrir la voie à un avenir meilleur pour tous. Ce chemin sera, sans aucun doute, semé d’embûches, mais il reste le seul issu pour sortir d’un cycle de confrontations violentes.