À deux jours du grand raout électoral au Gabon, où la présidentielle s’annonce aussi incertaine qu’un coup de dés, le duel se joue sur fond d’accusations intarissables et de promesses étourdissantes. Brice Clotaire Oligui Nguema, l’actuel chef de la transition, s’oppose à Alain-Claude Billie-By-Nze, le dernier Premier ministre d’Ali Bongo. Deux figures, un pays en tumulte et une économie en déséquilibre. Le tableau est planté.
Mais, au-delà des déclarations enflammées et des chiffres fumeux, une question cruciale reste en suspens : à qui profite vraiment ce jeu de dupes ? En ces temps de crise, où la dette gabonaise frôle les sommets – 8 500 milliards de francs CFA selon Billie-By-Nze, versus 7 000 milliards selon les autorités – la gestion de l’argent public prend un tour tragique. Que cache cette danse des chiffres ? Qui est vraiment redevable de cette spirale d’endettement ?
D’un côté, nous avons Oligui, qui revendique un rebond de l’économie, le règlement d’échéances et des promesses de lendemains radieux. De l’autre, Billie-By-Nze, qui brandit des accusations de dette cachée et de falsification, comme le chef d’un mouvement de résistance aux tendances d’une transition qui semble vouloir temporiser les vérités dérangeantes. Chaque camp se donne l’air d’un chevalier blanc, mais la réalité est plus nuancée.
Pour ajouter une couche à ce drame électoral, n’oublions pas que derrière ces joutes verbales s’étendent des préoccupations profondes, souvent étouffées dans le brouhaha des discours : Quid des populations les plus vulnérables qui portent le poids de cette dette ? Que répond le gouvernement aux Gabonais qui peinent à joindre les deux bouts, quand 45,6% des ressources de l’État sont consacrées au remboursement de la dette ? À qui sera vraiment imputé ce fardeau en fin de compte ? Une fois encore, les promesses de développement se heurtent à la dure réalité de l’économie.
Il est également révélateur de voir comment l’agenda politique semble se télescoper avec des choix économiques complexes. D’un côté, on parle de rembourser les bailleurs de fonds comme une victoire, mais à quel prix pour la population ? Les agences de notation, telles des veuves éplorées, continuent à ajuster leurs compassions en baissant les notes du Gabon, remettant encore en question cette route semée d’embûches. Acte révolutionnaire ou simple cycle de maintien d’un système qui, à l’évidence, a besoin d’une cure de désintoxication radicale ?
Il est aussi pertinent de s’interroger sur le silence des voix critiques dans ce jeu politique. Les médias, souvent soumis aux diktats des annonceurs et des pouvoirs en place, n’osent pas explorer ces contradictions plus profondes. Qui parle vraiment des Gabonais dont la réalité quotidienne semble toujours écartée des fenêtres tapissées de promesses enivrantes ?
En scrutant ce paysage, on se prend à rêver d’une véritable transparence, d’un véritable engagement à restructurer la dette, mais aussi à l’améliorer avec la participation citoyenne. Et si la nouvelle génération, celle qui a l’énergie et le pouvoir de renverser les tables, décidait de briser le cycle habituel des reproches et de la démagogie pour réclamer plutôt la vérité — une vérité rude, mais libératrice ?
Alors que la date fatidique approche, une certitude se dessine : les Gabonais doivent se préparer à un vote qui n’est pas seulement un choix de personnes. Il s’agira, plus profondément, de choisir un chemin, à travers la brume et la dissimulation, vers un avenir où les mots ne seront plus vides de sens, mais chargés d’un espoir tangible, au-delà des chiffres et des promesses en l’air. En fin de compte, ce ne sont pas les chiffres ou les discours qui détermineront l’avenir du Gabon, mais la capacité à donner voix à ceux qui, jour après jour, portent le poids de cette interminable histoire de conflits et d’illusions.