**Retour sur une tragédie publique : Entre pouvoir et sécurité en RDC**
Le 2 avril 2025, Kinshasa a été le théâtre d’un événement tragique qui soulève des questions profondes sur l’interaction entre la sécurité des hautes personnalités et le traitement des agents de la force publique. Le décès du policier de circulation Fiston Kabeya après un incident avec l’escorte de la Première ministre Judith Suminwa Tuluka a révélé non seulement des dysfonctionnements au sein des forces de sécurité, mais aussi une tension latente dans l’écosystème politique et social congolais.
### Un incident révélateur
Les circonstances entourant le décès de Kabeya sont encore, pour beaucoup, floues et sujettes à interprétation. Selon la version avancée par *Fatshimetrie*, l’agent aurait été blessé après avoir tenté de réguler la circulation face à une escorte en violation des règles de circulation. Les déclarations contradictoires sur l’emplacement et la nature de l’incident soulignent une problématique plus large : la discipline et la responsabilité au sein des forces de sécurité, surtout lorsqu’elles interviennent dans la protection de personnalités politiques.
Le procès de la version officielle est souvent teinté de la perception publique selon laquelle des forces de l’ordre jouant un rôle protégé peuvent agir en toute impunité. Ce sentiment, exacerbé par les inégalités flagrantes au sein des institutions publiques, nourrit un désenchantement envers l’autorité de l’État. Les questions récurrentes de violation des droits humains par les forces de sécurité face aux civils, exacerbées par une culture de l’impunité, mettent en lumière un défi majeur que la RDC doit impérativement relever si elle souhaite renforcer la confiance du public en ses institutions.
### Une manipulation politique ?
L’implication de la Première ministre dans cette affaire, selon certains médias comme *EcoNews*, semble faire l’objet d’une exploitation à des fins politiques. Dans une RDC déjà affaiblie par des luttes de pouvoir intérieure, le décès du policier pourrait bien être ajouté à un arsenal de discours politique visant à discréditer Judith Suminwa, considérée comme un acteur de changement positif.
À première vue, cela pourrait être une simple coïncidence, mais la notion de complot alimente une interprétation où les enjeux politiques prennent le pas sur la tragédie humaine. Les déclarations de Constant Mutamba, à la fois ministre de la Justice et chef de file d’un parti d’opposition, ne font qu’ajouter à cette complexité. Face à la promesse d’un gouvernement d’unité nationale, refusant une approche plus ouverte, l’ancienne dynamique de fragmentation politique semble réapparaître, brouillant davantage les cartes des alliances.
D’un point de vue sociologique, cet incident pourrait également être interprété comme une réflexion des fractures sociales au sein du pays, où la violence institutionnelle se manifeste régulièrement. Au lieu de résoudre les problèmes, les élites, en cherchant systématiquement à contourner des règles établies pour leur propre bénéfice, aggravent la colère populaire et l’aliénation des forces de l’ordre, qui, elles aussi, sont souvent les premières victimes de telles violences.
### Un appel à l’action
Face à cette confluence d’événements, il est essentiel que la RDC prenne des mesures immédiates et significatives pour réformer son appareil sécuritaire. Des formations sur le respect des droits humains, un encadrement permanent des agents de sécurité, ainsi que l’établissement d’un cadre légal clair sur les contraintes d’usage de la force lors des interventions sont des étapes cruciales pour éviter que des tragédies comme celle de Fiston Kabeya ne se reproduisent.
Les consultations nationales actuellement en cours doivent également se pencher sur la constitution d’un nouvel équilibre entre le pouvoir exécutif et les forces de sécurité, favorisant leur autonomie tout en les rendant responsables devant la justice. Un débat ouvert et inclusif sur la sécurité, impliquant des acteurs de la société civile et des représentants des différentes couches sociales, pourrait servir de catalyseur pour une réconciliation des divergences.
### Conclusion
En définitive, l’affaire Fiston Kabeya, au-delà d’un fait divers tragique, est une opportunité pour la RDC de réévaluer sa gouvernance et ses engagements envers la population. L’adage selon lequel “la manière dont une société traite ses membres les plus vulnérables est un baromètre de sa véritable éthique” prend tout son sens dans cette situation. En redonnant confiance aux citoyens et aux forces de l’ordre, le pays pourrait audacieusement se projeter vers un avenir ancré dans la sécurité, la justice, et la vérité.