**Évaluation du Rapport sur la Pauvreté et les Droits Humains au Rwanda : Vers une Réflexion Constructive**
Le rapport récemment présenté par le rapporteur spécial des Nations Unies sur l’extrême pauvreté et les droits humains, Olivier de Schutter, à Kigali ouvre un débat essentiel sur les progrès et les défis auxquels le Rwanda est confronté. Bien que le pays ait réussi une réduction significative de la pauvreté, passant de 39,8 % en 2018 à 27,4 % en 2024, des questions cruciales demeurent concernant les inégalités et la durabilité de cette croissance.
Le constat de la sortie de près de 1,5 million de Rwandais de la pauvreté en sept ans est indéniablement un signe positif. Cela témoigne des efforts entrepris par le gouvernement rwandais dans un contexte de croissance économique soutenue, oscillant entre 7 et 8 % par an. Cependant, cette croissance, aussi prometteuse soit-elle, ne bénéficie pas uniformément à tous les segments de la population. En effet, le rapport souligne que la plupart des pauvres restent des petits agriculteurs, souvent marginalisés et dans une situation de vulnérabilité persistante.
### Investir dans les Ressources Humaines
Olivier de Schutter appelle à un besoin urgent d’investissement dans les ressources humaines, particulièrement en matière d’éducation et de nutrition. Le faible niveau d’instruction et les inquiétudes autour de la malnutrition infantile sont des indicateurs alarmants. Environ quatre enfants rwandais sur dix présentent des signes de malnutrition, ce qui non seulement compromet leur développement personnel, mais aussi l’avenir économique du pays. En investissant dans l’éducation et en améliorant les conditions de vie, le Rwanda pourrait s’attaquer non seulement aux symptômes de la pauvreté, mais également aux causes profondes.
### Les Enjeux de la Dette et de la Formalisation de l’Emploi
Un autre aspect souligné dans le rapport est la question de la dette publique, qui dépasse aujourd’hui 78 % du PIB. Cette situation soulève des préoccupations quant à la viabilité financière à long terme du pays. L’accès à des financements extérieurs tendant à diminuer, le Rwanda doit se préparer à renforcer ses ressources nationales. Cela pourrait passer par la formalisation des emplois. Avec 82 % de la population active travaillant dans l’informel, le défi est double : il est non seulement urgent de donner une certaine sécurité aux travailleurs, mais aussi de garantir une base fiscale suffisante pour soutenir les dépenses publiques essentielles.
### Les Défis de la Collecte Fiscale et le Risque de Marginalisation
La nécessité d’améliorer la capacité de collecte fiscale est un point crucial. Une meilleure gestion des ressources pourrait permettre au gouvernement rwandais de diversifier son financement sans dépendre excessivement des bailleurs de fonds extérieurs. En parallèle, il convient de s’interroger sur l’impact que pourrait avoir l’établissement d’un salaire minimum sur le bien-être des travailleurs, en sachant qu’un travailleur sur quatre vit actuellement dans la pauvreté.
### Un Appel à l’Ouverture et à la Discussion
La recommandation d’une ouverture à la critique des politiques publiques représente un tournant potentiel dans la manière dont le gouvernement interagit avec ses citoyens. La transparence et l’engagement dans le dialogue sont des éléments clés pour une gouvernance efficace. Cela pourrait renforcer non seulement la confiance des citoyens, mais également favoriser des initiatives collaboratives visant à cibler les inégalités persistantes.
### Conclusion : Vers des Solutions Collaboratives
Le rapport de l’ONU, bien qu’il mette en lumière des défis importants, constitue également une opportunité pour le Rwanda de réévaluer et de redéfinir ses priorités. L’appel à investir dans l’éducation, à formaliser l’économie, à diversifier le financement et à encourager le dialogue public est une invitation à une réflexion collective sur l’avenir du pays. Une approche inclusive et participative pourrait non seulement soutenir le développement économique, mais également créer une société plus équitable pour tous les Rwandais.
Ainsi, au-delà des chiffres, c’est une question de voix et de dignité humaine qui doit guider les efforts de développement au Rwanda. Comment le pays peut-il s’assurer que chaque citoyen a non seulement le potentiel de sortir de la pauvreté, mais aussi d’aspirer à une vie digne et épanouissante ? Les réponses à ces questions n’appartiennent pas seulement à ceux qui les formulent, mais également à ceux qui en vivent chaque jour les conséquences.