**Kolwezi : Pénurie d’eau potable, un silence assourdissant sur l’angoisse des habitants**
Kolwezi, ce nom résonne comme un écho de promesses inachevées dans la province du Lualaba, en République Démocratique du Congo. Ici, l’eau, source de vie, de santé, d’espoir, devient un luxe que peu peuvent se permettre. À peine 10 % des habitants ont accès à l’eau potable fournie par la REGIDESO, majoritairement dans des quartiers historiques, tandis que les nouvelles zones, bouillonnantes de vie et d’envies, restent comme figées dans l’oubli. Comment est-on arrivé là ? Et, plus tragique encore, pourquoi cela n’émeut-il pas davantage les consciences ?
À première vue, la situation pourrait ressembler à un récit ordinaire de crise d’infrastructures. Les coupures de courant, souvent évoquées comme des paralyzantes entraves à l’activité de la REGIDESO, sont plus qu’un simple cliché. Peter Eseka, chef de centre, évoque une dépendance accablante à la SNEL (Société Nationale d’Électricité), cette même entreprise dont les coupures semblent devenir la norme indiscutable. Mais au-delà des machines à diesel épuisées, que cache cette résignation ? Quels espoirs se perdent entre les canalisations rouillées et les promesses hésitantes ?
La ville s’étend, les quartiers bourgeonnent, mais pour les résidents de ces nouvelles zones, vivre au quotidien devient un jeu de roulette souvent tragique. Les familles doivent faire preuve d’une ingénieuse créativité pour se nourrir et se laver. Leurs solutions improvisées, des réservoirs d’eau stockée à des kilomètres de là, impliquent des frais faramineux pour une qualité d’eau parfois douteuse, un vrai faux choix entre prix et santé. Ces réalités témoignent d’une résilience étonnante, au prix d’une pression croissante qui, elle, reste invisible.
Peut-on réellement parler d’une politique publique en matière d’eau dans un pays où les réalités locales sont systématiquement ignorées ? La Banque mondiale, en injectant de l’argent dans des projets de grande envergure, semble vouloir dessiner une issue. Mais une usine en béton, même si elle vient à se réaliser, pourra-t-elle réellement résoudre le problème ? La question sous-jacente est presque provocante : est-ce que nous cherchons à construire des solutions qui correspondent réellement aux besoins des populations, ou bien à respecter des normes internationales qui ne reflètent en rien les combats du quotidien des Congolais ?
Le projet d’implanter des réserves d’eau dans des zones stratégiques, dont parle Eseka, semble une solution pragmatique. Cependant, qui s’assure que cette « stratégie » se traduira en actions concrètes ? Qui entendra les voix des femmes qui, chaque matin, parcourent des kilomètres pour trouver une goutte d’eau potable, tout en jonglant avec les promesses politiques et les discours technocratiques ? Ce silence qui s’installe entre les plans sur le papier et la réalité des canalisations à sec évoque une sorte de dédain institutionnel : les malheurs des uns contre l’inertie des autres.
Il y a une tension sous-jacente, celle entre la ville qui aspire à l’infrastructure moderne et les quartiers en souffrance qui crient leur colère silencieuse. L’hygiène, la santé et l’économie locales en pâtissent tandis que la population, souvent résignée mais pas toujours muette, observe. La santé publique ne devrait-elle pas être une priorité en période de flambée épidémique ? La lutte contre des maladies liées à la pauvreté, telles que le choléra, ne devrait-elle pas se dérouler dans le flot de ce que devrait être le droit à l’eau potable ?
Alors que Kolwezi se débat avec une crise qui semble s’éterniser, la question est lancinante : Ne sommes-nous pas tous responsables, à un niveau ou un autre, de ces dramas invisibles qui se jouent dans l’ombre des grandes cités ? La régulation politique, des entreprises aux gouvernements, ne devra pas se contenter d’être des témoins de l’errance des populations. Nous devons écouter ces cris étouffés et donner un visage à cette lutte muette, car le peu qui reste – l’eau – est plus qu’une simple ressource. C’est un cri de vie.