### Crise humanitaire et mouvements de populations : Le spectre de l’AFC/M23 flotte sur Lubutu
Le 20 mars 2025, la cité de Lubutu-centre, dans la province du Maniema, a été frappée par une vague de déplacements de populations, déclenchée par l’occupation de la cité de Walikale par les rebelles de l’AFC/M23. À première vue, cet événement semble n’être qu’un énième épisode tragique de l’instabilité en République Démocratique du Congo (RDC), mais en le regardant de plus près, il met en lumière les enjeux géopolitiques, socio-économiques et humanitaires qui touchent la région.
#### Les causes profondes du déplacement
La situation à Lubutu, comme bien d’autres dans l’est de la RDC, ne peut être réduite à la simple violence armée. Elle s’inscrit dans un tableau complexe où la pauvreté, l’absence de gouvernance, et l’instabilité politique créent un terreau fertile pour les groupes armés. Selon le dernier rapport du Bureau de la Coordination des affaires humanitaires (OCHA), plus de 5 million de personnes sont déplacées en RDC, et près de 30 millions souffrent d’insécurité alimentaire. Ces chiffres, alarmants en soi, donnent un aperçu des conséquences d’un manque d’intervention internationale cohérente.
En raison de la proximité de Lubutu avec des zones de conflit comme Walikale (situé à seulement 202 kilomètres), les résidents de Lubutu-centre comprennent que la sécurité est devenue précaire. Cela force de nombreuses familles à fuir vers des terres qui semblent plus sûres, même si ces régions sont elles-mêmes menacées. Un habitant a d’ailleurs exprimé l’incertitude ambiante : « Nous ne savons pas où nous sommes en sécurité. La psychose nous pousse à fuir vers l’inconnu. »
#### Un niveau d’angoisse insoutenable
Ce qui rend la situation encore plus préoccupante est l’impact psychologique sur les populations. À Lubutu, on observe non seulement des déplacements physiques, mais aussi une fuite de l’espoir. Cette psychose collective conduit à une stagnation dans les activités économiques, mettant une pression supplémentaire sur des services de santé déjà débordés. Selon une source hospitalière, « l’inquiétude est au zénith », et les infrastructures sanitaires tentent de faire face à ce flot de déplacés, souvent sans les ressources nécessaires pour leur fournir des soins adéquats.
De plus, la mobilisation des écoles et des églises comme lieux de refuge témoigne de la solidarité locale, mais cette situation ne devrait pas devenir une norme. Dans un état où l’éducation est déjà fragile, l’attente des enfants qui dorment à l’école ou dans des centres de prière est inquiétante.
#### Une réponse internationale limitée
Bien que des organisations humanitaires soient présentes sur le terrain, leur portée reste limitée. Il a été constaté que les ressources apportées par la communauté internationale se heurtent souvent à des obstacles bureaucratiques, ainsi qu’à une lacune dans la sensibilisation des pays donateurs. À titre d’exemple, moins de 40 % des fonds destinés à l’aide humanitaire en RDC ont été mobilisés jusqu’à présent, entraînant des conséquences catastrophiques au sol.
La situation à Lubutu souligne le besoin urgent d’engagements internationaux renouvelés, mais aussi de solutions durables qui traitent les causes profondes des conflits. La RDC n’est pas seulement un pays en crise ; elle est un microcosme des défis contemporains de la gouvernance, de l’État de droit et du développement humain.
#### Vers une résilience communautaire
En dépit des défis colossaux, il existe des lueurs d’espoir grâce à la résilience des communautés touchées. L’initiative de création de comités locaux pour gérer l’afflux de déplacés et fournir un soutien mutuel est un signe de solidarité. Des efforts pour enregistrer les déplacés et leur fournir une assistance de base, qu’elle soit alimentaire ou médicale, sont déjà en cours, mais nécessitent un soutien accru de la part des ONG et du gouvernement.
Il est impératif que les actions menées ne se limitent pas à des réponses à court terme, mais visent également à renforcer la résilience à long terme. Cela nécessite des investissements dans l’éducation, la santé et les infrastructures locales, tout en impliquant les bénéficiaires dans les processus décisionnels.
### Conclusion
La crise qui secoue Lubutu et ses environs est le reflet d’une réalité plus vaste qui nécessite un changement de paradigme dans la manière dont nous abordons les conflits et l’aide humanitaire. En offrant une aide efficace, en renforçant les systèmes locaux et en abandonnant les méthodes passives de cœur et de main, il est possible de transformer cette tragédie en une opportunité de renaissance pour la région. Un engagement collectif, tant au niveau national qu’international, est essentiel pour garantir que Lubutu, et la RDC dans son ensemble, ne soit pas seulement un symbole de désespoir, mais aussi de solidarité et de résilience face à l’adversité.