**Reconstruction de Gaza : Une Vision Égyptienne Contre un Agenda Américain**
Le recent sommet de la Ligue arabe, organisé à Cairo, a marqué un tournant significatif dans le dialogue sur l’avenir de Gaza, une région durablement touchée par des conflits récurrents. Les dirigeants arabes, unis derrière le plan proposé par l’Égypte, semblent avoir pris position pour une solution plus humaine et durable que l’approche représentée par l’ancien président américain Donald Trump, qui préconisait une démographie fédérée et une transformation du territoire en destination balnéaire.
### Un Plan Ambitieux mais Controversé
Le projet égyptien, qui prévoit un investissement de 53 milliards de dollars dans la reconstruction de Gaza d’ici 2030, propose une approche réaliste et pragmatique, tout en garantissant à la population de près de 2 millions de Palestiniens de rester sur place. En contraste frappant avec l’approche américaine, qui avait pour but de “dépopuler” Gaza, le plan égyptien s’engage à préserver les droits des Palestiniens et à investir dans leur avenir.
Le fait que le plan ait réussi à obtenir le soutien des principaux leaders arabes, y compris ceux du Qatar, des Émirats Arabes Unis et d’Arabie Saoudite, souligne l’importance de la solidarité régionale face à une politique américaine souvent perçue comme unilatérale et déséquilibrée. Le chef de la Ligue arabe, Ahmed Aboul Gheit, a bien résumé le consensus lors du sommet : « La paix est l’option stratégique des Arabes ». Cette déclaration va au-delà d’un simple mantra, elle témoigne d’une volonté collective d’orienter les efforts vers une résolution permanente de la crise, qui a trop souvent causé des souffrances humaines extrêmes.
### Les Dimensions Politiques et Sociales du Plan Égyptien
Le plan comporte des aspects innovants, tels que la création de centaines de milliers de logements temporaires, la réutilisation des débris pour l’expansion des terres côtières de Gaza, et un accent sur des développements durables et une intégration énergétique renouvelable, ce qui montre une prise en compte des nécessités écologiques face à l’urgence humanitaire. Mais la mise en œuvre de ces projets dépendra de la capacité de l’Égypte à convaincre à la fois Israël et le Hamas, souvent en désaccord sur des points cruciaux.
Pour que ce projet prenne vie, il est crucial que les acteurs internationaux, y compris l’ONU et les bailleurs de fonds, s’engagent sincèrement à soutenir cette initiative. L’appel à une force de maintien de la paix par l’ONU, comme évoqué dans le communiqué final du sommet, inclut une reconnaissance des inquiétudes sécuritaires israéliennes tout en soulignant la nécessité d’une approche équilibrée qui favorise les droits des Palestiniens.
### Une Comparaison avec le Passé
En nous penchant sur l’histoire, il est instructif de comparer cette initiative à la manière dont les Accords d’Oslo de la fin des années 90 avaient été conçus avec l’espoir d’une paix durable. Toutefois, ce processus a échoué à créer des bases solides pour une résolution à long terme, en partie à cause de la méfiance entre les parties et le manque de soutien international cohérent. Le plan égyptien pourrait profiter d’une leçon apprise, mettant l’accent sur la nécessité d’un soutien financier international, mais aussi sur l’importance d’avoir des acteurs locaux, tant au sein du Hamas que de l’Autorité palestinienne, unanimes sur l’approche vis-à-vis de l’occupation israélienne.
### Les Défis à Surmonter
Un des défis majeurs réside dans la position d’Israël. Le gouvernement israélien, qui a récemment rejeté toute implication de l’Autorité palestinienne à Gaza, exprime une volonté de renforcer son contrôle sécuritaire. Cela indique une réticence à faire des concessions, et la promesse d’un « nouveau contexte de sécurité et politique à Gaza », comme mentionné par el-Sissi, pourrait rester lettre morte sans des concessions réciproques.
De plus, la question de la disarmement du Hamas demeure un obstacle majeur. Les récents événements ont souligné que l’armement du groupe est logique pour sa survie, tant sur le plan interne qu’externe. La balistique de la résistance face à l’occupation israélienne est, pour beaucoup, un symbole de la lutte pour l’autodétermination, rendant difficile toute acceptation d’une renonciation de la force.
### Vers une Nouvelle Épopee?
L’impact de cette réunion pourrait définir les contours géopolitiques du Moyen-Orient dans les années à venir. La capacité de l’Égypte à fédérer la communauté internationale autour de son plan pourrait établir un modèle de marque de fabrique en matière de résolution des conflits : une approche qui reconnait les droits des opprimés tout en cherchant à instaurer une paix durable.
La mise en œuvre de cette vision, centrée sur l’engagement des acteurs locaux, apportera non seulement une aide humanitaire immédiate mais séculière aux efforts de paix. Les mois et années à venir seront décisifs pour évaluer si cette initiative réussit à abattre les murs de méfiance ou si elle finira, comme tant d’autres, par être une occasion manquée. Au fond, la reconstruction de Gaza consiste aussi à relever le défi d’une paix véritable, permettant à toutes les parties de coexister dans la dignité et le respect mutuel.