Comment les violences à Goma révèlent l’échec du système judiciaire et poussent les citoyens à la revanche ?

**L’insécurité à Goma : Un cri d’alerte d’une population à bout de nerfs**

Le dimanche 1er octobre 2023 restera gravé dans les mémoires des habitants des quartiers Kiziba et Mabanga Nord de Goma, alors qu’ils ont tenté de reprendre le contrôle de leur sécurité face à une montée alarmante de la criminalité. L’émergence d’un climat de peur et d’inquiétude se fait sentir, exacerbée par une série d’incidents violents, notamment le lynchage d’un bandit connu, Ushindi, accusé de nombreux vols armés et de meurtres.

### La boucle infernale de l’insécurité

Les événements de ce week-end ne sont pas un phénomène isolé, mais témoignent d’une dynamique récurrente où le sentiment d’impunité parmi les criminels a atteint un seuil insupportable pour les citoyens. Les témoignages recueillis reflètent un ras-le-bol général : « Nous nous inquiétons aujourd’hui de la montée de l’insécurité… Il ne se passe jamais une nuit sans qu’il y ait un cas de vol », déplore un habitant du quartier de Karisimbi.

Ce climat précaire a engendré des réactions énergiques, voire violentes de la part des riverains, dont la colère s’exprime souvent par des actes de lynchage. Ce phénomène rappelle d’autres régimes où les populations, abandonnées à elles-mêmes, prennent des mesures extrêmes pour défendre leur sécurité. De nombreux pays, en Afrique et ailleurs, ont vu des situations similaires. Par exemple, au Nigeria, des lynchages de présumés criminels sont également rapportés, mettant en lumière un désespoir face à l’incapacité des institutions à répondre aux besoins fondamentaux de sécurité.

### Une relation compliquée avec la justice

L’affaire Ushindi soulève une question essentielle concernant les mécanismes judiciaires en place. Les répétitions de ses interpellations et libérations successives semblent indiquer des failles au sein du système judiciaire. Ce schéma peut être vu comme le reflet d’un système corrompu ou inefficace, souvent entravé par des ressources limitées et une infrastructure judiciaire déficiente. Ces éléments favorisent une perte de confiance chez une population qui se sent trahie par ceux qui sont censés les protéger.

Les organisations de défense des droits de l’homme, telles qu’Amnesty International, ont long été en désaccord avec des pratiques de justice qui favorisent des relâchements rapides de criminels sans réelles possibilités de réhabilitation. Les avocats soulignent que chaque fois qu’un criminel est remis en liberté, il renforce l’angoisse des citoyens qui choisissent de prendre les choses en main, comme ce fut le cas avec le lynchage de ce week-end.

### Une spirale de violence

Le second incident survenu ce même jour dans le quartier Mabanga Nord, où un jeune voleur a été abattu après avoir ouvert le feu sur les passants, illustre la spirale de violence qui engendre encore plus d’inquiétude. Le recours au M23, un groupe prétendument en charge de la sécurité dans la zone, soulève d’autres questionnements concernant la militarisation de la sécurité. Historiquement, les interventions militaires dans des questions civiles ont souvent conduit à plus de chaos qu’à de l’ordre.

La Libération massive de détenus de la prison de Munzenze, suite à l’offensive du M23, constitue un facteur supplémentaire dans l’escalade de cette violence. Des récents rapports de la MONUSCO ont mis en évidence l’impact de telles actions sur la criminalité à Goma, établissant un lien direct entre l’instabilité politique et la hausse des actes criminels.

### Vers une approche préventive

Face à une situation jugée critique, il est impératif d’explorer des solutions qui vont au-delà de l’adoption de mesures réactives. Premier acte : redynamiser la confiance envers les institutions judiciaires et mettre en place des politiques axées sur la prévention plutôt que sur la répression. Le gouvernement, en collaboration avec la MONUSCO et les autorités locales, pourrait déployer des programmes d’éducation civique, de sensibilisation et de réhabilitation, afin de modifier l’image perçue de la justice et d’encourager la participation citoyenne dans la lutte contre l’insécurité.

En parallèle, il est crucial de renforcer les capacités des forces de l’ordre à fonctionner de manière éthique et professionnelle, renforçant ainsi leur autorité et leur légitimité dans les yeux du public. Des formations régulières et des mécanismes de contrôle pourraient diminuer les abus et garantir aux citoyens que la justice ne sera pas seulement un mot, mais une réalité.

### Conclusion

Les drames récents à Goma sont révélateurs d’un malaise social plus large, dont la solution nécessite un engagement collectif. En abordant de front les causes sous-jacentes de l’insécurité, plutôt que de se contenter de solutions temporaires, la ville de Goma pourrait retrouver un semblant de calme, permettant à ses habitants de vivre en paix. L’heure n’est plus à la vengeance ou au lynchage, mais bien à une coopération réfléchie et une reconstruction profonde des rapports sociaux et institutionnels. Les événements des derniers jours doivent être perçus non pas comme des incidents isolés, mais comme un tableau qui appelle avec force à une émergence des consciences et à un renouveau collectif.