Pourquoi l’opération Ndobo à Kinshasa soulève-t-elle des questions sur l’efficacité de la lutte contre les Kulunas et la nécessité d’une approche socio-économique?

**Opération Ndobo : Des chiffres alarmants, mais des enjeux plus profonds**

Le récent déploiement policier à Kinshasa, l
**Opération Ndobo : Enjeux de sécurité et enjeux sociaux à Kinshasa**

Le mois dernier, Kinshasa, la capitale de la République démocratique du Congo, a été le théâtre d’une opération policière d’envergure, baptisée « Ndobo », visant à lutter contre la criminalité urbaine. Selon le vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, Jacquemain Shabani, plus de 2 500 individus ont été interpellés, dont 276 condamnés, tandis que 2 301 autres se trouvent en détention préventive. Au-delà des chiffres alarmants, cette opération soulève des enjeux qui transcendent le simple cadre de la répression : elle met en lumière les dynamiques sociales, économiques et politiques qui alimentent le phénomène des Kulunas.

### Un chiffre qui parle

La première réaction face à ces chiffres peut être de s’interroger sur l’efficacité de l’opération. Avec 276 condamnés pour plus de 2 500 personnes interpellées, le taux de condamnation semble relativement faible, surtout si l’on considère que certains de ces individus ont été relaxés en raison de l’absence de charges suffisantes. Cela appelle à une réflexion plus profonde sur le système judiciaire et les mécanismes de traitement des affaires criminelles à Kinshasa. Paradoxalement, l’échec d’une opération aussi vaste à réduire significativement le nombre de délinquants pourrait suggérer que les causes de la délinquance ne se limitent pas à des actes isolés de banditisme.

### Un cadre socio-économique complexe

Les Kulunas ne sont pas des entités abstraites, mais des produits de leur environnement socio-économique. Dans une ville où la pauvreté est omniprésente et où l’accès à des services éducatifs et d’emploi de qualité est limité, un nombre croissant de jeunes, souvent désillusionnés et marginalisés, se tourne vers la criminalité comme dernier recours. Les statistiques témoignent d’une réalité inquiétante : selon l’Institut national de la statistique du Congo, près de 70% de la population urbaine vit sous le seuil de pauvreté. Comment alors s’étonner que des bandes comme les Kulunas prospèrent dans un tel terreau ?

### Une approche holistique nécessaire

Il est temps d’envisager une réponse plus intégrée à la criminalité urbaine, qui ne se limite pas à réprimer les actes délictueux. Les autorités doivent également investir dans des programmes socio-éducatifs, des initiatives économiques, et des campagnes de sensibilisation qui pourraient aider à réformer les mentalités et à offrir des alternatives viables à la jeunesse. Plusieurs modèles internationaux pourraient servir d’inspiration, tels que le programme de réhabilitation des jeunes en difficulté à Medellín, en Colombie, qui a contribué à réduire la violence urbaine de manière significative à travers des projets d’éducation et d’insertion professionnelle.

### L’importance de la confiance citoyenne

Par ailleurs, il est primordial de rétablir, voire d’instaurer, une relation de confiance entre la police et la population. La peur et la méfiance envers les forces de l’ordre ne feront qu’aggraver le phénomène de la criminalité. Il est crucial que les communautés soient impliquées dans les stratégies de sécurité et qu’elles se sentent parties prenantes dans la lutte contre le banditisme. Le dispositif de sécurité doit être pensé en concertation avec les acteurs locaux, en tirant parti de leur connaissance du terrain pour identifier les besoins et les solutions adaptées.

### Conclusion

L’opération Ndobo, bien que nécessaire, ne peut être considérée isolément d’un contexte socio-économique plus large. Si l’État congolaise souhaite véritablement éradiquer le phénomène des Kulunas, il devra se positionner non seulement comme un acteur de la répression, mais également comme un catalyseur de changements structurels au sein de la société. Cela nécessitera non seulement des investissements financiers substantiels, mais également un changement de paradigme dans la façon dont les autorités abordent les problèmes de sécurité et de développement. En définitive, la lutte contre la criminalité à Kinshasa passera par une approche pluridimensionnelle, où justice, sécurité, éducation et opportunités économiques seront indissociables.