L’engagement citoyen et les défis logistiques : Retour sur les élections en Namibie en 2024

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Dans les élections présidentielles et législatives en Namibie en 2024, la participation massive des citoyens a été soulignée comme un pas significatif vers la consolidation démocratique du pays. Malgré des défis logistiques et des allégations d’irrégularités, le peuple namibien a montré son engagement envers le processus démocratique en se rendant en grand nombre aux urnes.

Plus de un million de Namibiens, sur les 1,3 million d’électeurs inscrits, se sont présentés aux bureaux de vote, démontrant ainsi l’importance de l’engagement citoyen pour la préservation de la démocratie. Des files d’attente interminables dans les zones urbaines et rurales ont caractérisé une détermination collective à opérer un changement positif dans le pays.

Cependant, cette formidable mobilisation a été assombrie par des problèmes logistiques persistants. La mise en œuvre de la politique du « vote n’importe où », bien qu’ayant pour objectif d’améliorer l’accessibilité, a révélé des lacunes opérationnelles. Des dysfonctionnements techniques ont entravé le processus électoral, des bulletins de vote ont fait défaut et certains bureaux de vote ont ouvert en retard, prolongeant ainsi l’attente pour de nombreux électeurs. Ces difficultés ont été aggravées par l’incapacité de la Commission Électorale de Namibie (ECN) à gérer efficacement ces problèmes, remettant en question sa compétence opérationnelle.

De plus, l’externalisation de la production des bulletins de vote en Afrique du Sud, malgré une commande préalable, a mis en lumière la dépendance de la Namibie à l’égard des fournisseurs extérieurs. Cette reliance a sapé la confiance du public dans le processus électoral et souligne la nécessité pour la Namibie de renforcer ses capacités locales pour une gestion autonome de ses processus électoraux.

Ces erreurs ont touché de manière disproportionnée les électeurs des zones rurales et marginalisées, qui font déjà face à des obstacles systémiques à leur participation politique.

Au-delà des lacunes opérationnelles, des allégations de comportements répréhensibles et de violations de la loi électorale ont jeté une ombre sur le déroulement des élections. Les partis politiques se sont mutuellement accusés de diffuser des informations erronées et de pratiques injustes, alimentant le mécontentement public. Ces accusations ont mis en lumière la fragilité de la maturité politique de la Namibie ; les campagnes ont souvent privilégié la propagande aux débats de fond sur les politiques. Certains partis politiques ont même copié les manifestes des autres, sapant ainsi le discours politique authentique et complexifiant les choix offerts aux électeurs.

Plus de 15 000 votes, environ 1,4% du total, ont été rejetés. Bien que ce pourcentage puisse sembler faible, il représente des milliers de citoyens dont la voix a été effectivement étouffée. Bon nombre de ces rejets étaient dus à des erreurs des électeurs, soulignant un déficit en matière d’éducation civique. Les efforts de sensibilisation de l’ECN n’ont pas suffi à combler ce manque de connaissance, en particulier dans les régions rurales où la compréhension des processus électoraux reste limitée.

Les « partis d’opposition » ont remis en question l’équité du processus électoral, alléguant des irrégularités dans le décompte des voix, des pénuries de bulletins de vote dans les bureaux de vote et du processus de tabulation. Bien que des mécanismes juridiques existent pour traiter ces litiges, tels que le tribunal électoral, le tribunal électoral et la cour suprême, la reconstruction de la confiance du public s’annonce bien plus difficile. Des systèmes électoraux transparents et efficaces sont essentiels pour maintenir la crédibilité, et la Namibie doit s’efforcer de reconstruire cette base.

Les résultats des élections ont confirmé la dominance de Swapo, qui a conservé la présidence (la future présidente Netumbo Nandi-Ndaitwah ayant obtenu 638 560 voix, soit 57,31%) et une majorité à l’Assemblée nationale (583 300 voix, soit 54%, – 51 sièges sur 63 en 2029). Cependant, le paysage politique semble évoluer, comme en témoigne l’influence croissante de partis d’opposition tels que les Patriotes Indépendants pour le Changement (IPC) (20 sièges) et le Mouvement de Repositionnement Affirmatif (AR) (six sièges). Ces partis ont capitalisé sur le mécontentement des jeunes électeurs urbains, signalant ainsi une volonté d’alternatives au règne de longue date de Swapo.

La persistance d’un système politique dominé par un seul parti présente des opportunités et des risques. L’expérience de Swapo en matière de gouvernance assure une certaine stabilité en ces temps incertains. Cependant, son contrôle prépondérant risque de favoriser la complaisance et de freiner le changement. Les défis de la Namibie – le chômage des jeunes, le manque de logements adéquats et la corruption – exigent des solutions novatrices qui pourraient ne pas émerger dans le cadre d’une domination unipartite, à moins que des plans stratégiques et une gestion rigoureuse ne soient mis en place.

Les partis disposant de moins de sièges, malgré leurs gains électoraux, pourraient continuer à lutter pour obtenir une représentation significative, comme cela a déjà été observé par le passé. Le système de représentation proportionnelle de la Namibie, bien qu’ayant pour objectif d’assurer l’inclusivité, n’a pas encore réussi à se traduire en une réelle représentativité pour tous les citoyens.

En conclusion, les élections en Namibie en 2024 ont été le théâtre d’un engagement citoyen massif, mais aussi de défis logistiques et de controverses. Ces événements ont mis en lumière à la fois la volonté du peuple namibien de participer activement à la vie démocratique du pays et les lacunes persistantes dans le fonctionnement de ses institutions électorales. Pour consolider la démocratie en Namibie, il est essentiel de relever ces défis, de renforcer la transparence et la responsabilité du processus électoral, et de favoriser un dialogue politique constructif et inclusif.