La bataille parlementaire autour du projet de loi sur la déportation vers le Rwanda: un défi majeur pour le gouvernement britannique

Au cœur d’une lutte politique et législative, le projet britannique visant à déporter des demandeurs d’asile au Rwanda se retrouve au centre d’un débat épineux entre la House of Lords et le gouvernement. L’introduction d’amendements au projet de loi sur la sécurité du Rwanda par la chambre haute a provoqué un report de son examen à la House of Commons, signe d’une résistance inattendue.

Initialement, le gouvernement espérait que le projet de loi serait adopté sans encombre, mais les amendements apportés par la Lords mettent en lumière une opposition significative dans cette chambre, où les Conservateurs ne détiennent pas la majorité. Malgré ce contretemps, le projet devrait passer en loi dans un avenir proche, probablement la semaine prochaine.

À l’origine de cette législation se trouve la volonté du Premier Ministre Rishi Sunak de lutter contre l’immigration illégale en mettant en place des vols de déportation vers le Rwanda. Le Ministre de l’Intérieur, Michael Tomlinson, a souligné la nécessité de cette loi pour combattre le trafic d’êtres humains.

Cependant, ce plan se heurte à des défis juridiques, et aucun migrant n’a été envoyé au Rwanda en vertu de l’accord existant signé il y a deux ans. Les détracteurs font valoir qu’il est contraire à l’éthique de déporter des migrants vers un pays où ils ne souhaitent pas vivre.

Le projet de loi sur la sécurité du Rwanda vise à contourner l’interdiction d’envoyer des migrants au Rwanda imposée par la Cour Suprême du Royaume-Uni, qui a jugé en novembre que ce pays de l’Afrique de l’Est n’était pas une destination sûre pour les demandeurs d’asile, car il existe un risque qu’ils soient renvoyés dans leur pays d’origine en proie aux conflits qu’ils ont fui.

En réponse, la Grande-Bretagne et le Rwanda ont signé un traité s’engageant à renforcer les protections des migrants. Le gouvernement de Sunak soutient que le traité lui permet de promulguer la nouvelle loi, déclarant le Rwanda comme un pays sûr, rendant ainsi plus difficile pour les migrants de contester leur déportation et permettant au gouvernement britannique d’ignorer les injonctions de la Cour Européenne des Droits de l’Homme qui interdisent les expulsions.

Des groupes de défense des droits de l’homme, des organisations caritatives pour les réfugiés, des hauts dignitaires de l’Église d’Angleterre et de nombreux juristes ont critiqué la législation. En février, un observatoire des droits parlementaires a déclaré que le plan concernant le Rwanda était  » fondamentalement incompatible  » avec les obligations du Royaume-Uni en matière de droits de l’homme.

Le Projet de Loi sur la Sécurité du Rwanda a été approuvé en janvier par la Chambre des Communes, où les Conservateurs de Sunak détiennent la majorité, mais a rencontré une forte opposition à la Chambre des Lords, la chambre haute du Parlement. Les Lords ont à plusieurs reprises inséré des amendements pour atténuer la législation, notamment en exemptant les Afghans ayant collaboré avec les forces britanniques de la déportation.

Ces amendements ont tous été rejetés par les Communes, mais les Lords ont systématiquement rétabli les changements.

Le gouvernement a refusé d’accepter des amendements. Un porte-parole du Premier Ministre Rishi Sunak a déclaré mercredi: « Nous ne envisageons pas de concessions. »

Les principaux partis d’opposition britanniques s’opposent à la législation. La parlementaire du Parti National Ecossais, Alison Thewlis, a exhorté le Parti Travailliste à abroger la loi s’il remporte les élections plus tard cette année, comme le suggèrent les sondages.

« Le Projet de Loi sur le Rwanda est un projet indigeste qui ne peut être amélioré, » a-t-elle déclaré. « Il est absolument révoltant et inacceptable à tous égards. »

Cette confrontation entre les différentes instances politiques et les organes de protection des droits de l’homme souligne des enjeux humanitaires cruciaux dans un contexte migratoire tendu en Europe et dans le monde. L’issue de ce débat législatif aura des répercussions profondes tant sur les politiques migratoires britanniques que sur les engagements internationaux en matière de droits de l’homme.