Taïwan : la montée en puissance des groupes de défense civile face à la menace chinoise
Dans un contexte marqué par les tensions entre la Chine et Taïwan, les groupes de défense civile taiwanais gagnent en importance. Malheureusement, une partie de la société taïwanaise semble indifférente à cette montée en puissance et craint que préparer ouvertement une invasion chinoise ne vienne compromettre le fragile statu quo en place. Pourtant, de plus en plus de jeunes taïwanais souhaitent que le gouvernement s’engage davantage à développer la défense civile. C’est ce que nous avons pu constater lors d’un reportage à Taïwan.
À Taïwan, où la législation interdit la possession d’armes à feu, les clubs d’airsoft sont devenus un moyen pour les civils de s’entraîner et d’acquérir une culture militaire. Ces répliques d’armes à feu, utilisant de petites billes en plastique, permettent aux participants de se familiariser avec les armes et de développer des compétences qui pourraient s’avérer utiles en cas d’invasion chinoise. Pour Bill Huang, un étudiant en génie mécanique de 19 ans, s’entraîner à l’airsoft est une façon de pallier les lacunes de l’entraînement militaire taïwanais. Selon lui, les compétences acquises sur un stand d’airsoft pourraient être utiles pour la défense civile, car les répliques fonctionnent exactement comme de vraies armes. Il est convaincu que si un jour le gouvernement lui donne un pistolet ou un fusil, il sera capable de s’en servir pour défendre son pays.
Le reportage nous permet de rencontrer Brian, un autre adepte de l’airsoft, qui s’entraîne avec une réplique du fusil d’assaut américain M4. Son engouement pour le club « Camp 66 » est motivé par la volonté de se préparer en cas d’invasion chinoise. Avec son casque militaire, son foulard cachant son visage et sa réplique d’arme à feu en bandoulière, Brian nous rappelle l’importance de l’entraînement et de la maîtrise des armes à feu, même s’il ne s’agit que de répliques. Richard Limon, ancien marine américain et instructeur de tir sur le stand « Camp 66 », souligne l’importance de l’apprentissage de la manipulation des armes à feu avec précaution.
Pourtant, malgré cette volonté croissante de se préparer à une éventuelle invasion chinoise, une grande partie de la population taïwanaise est attachée au maintien du statu quo avec la Chine continentale. Les trois candidats en lice lors de l’élection présidentielle partagent tous une position similaire : ni réunification, ni affrontement avec la Chine. Cette situation politique freine les ambitions de réforme en matière de défense civile.
Les adeptes des groupes de défense civile déplorent que la menace chinoise soit souvent passée sous silence et reprochent au gouvernement de ne pas soutenir suffisamment les initiatives visant à préparer la population à une éventuelle guerre. Ils estiment que le système de défense civile actuellement en place, principalement axé sur la gestion des désastres naturels, est inefficace.
Dans ce contexte tendu, des personnes comme Tony Lu, qui a combattu dans la légion internationale ukrainienne en 2022, appellent leurs compatriotes à se préparer en cas d’invasion chinoise. Selon lui, la plupart des participants aux activités de défense civile sont frustrés par le manque de réaction du gouvernement taïwanais face aux incursions chinoises récentes.
La montée en puissance des groupes de défense civile à Taïwan reflète une prise de conscience croissante de la menace que représente la Chine. Malgré les réticences d’une partie de la société taïwanaise, de plus en plus de jeunes se préparent activement à la possibilité d’une invasion. Reste à savoir si le gouvernement tiendra compte de cette volonté et soutiendra ces initiatives de défense civile dans les années à venir.