À Madagascar, les éleveurs de bovins du marché d’Ivohitra à Antsirabe font face à de vives tensions et à une situation économique difficile. Les prix élevés et l’inflation croissante rendent la vente de leurs bêtes de moins en moins intéressante, tandis que l’achat d’un nouvel animal devient de plus en plus difficile. Ces éleveurs, loin de se décourager, ont décidé de faire entendre leur voix lors des élections présidentielles prévues le 16 novembre.
De nombreux éleveurs ont déjà abandonné leur troupeau, affecté par les turbulences politiques de 2009, 2018 et plus récemment la pandémie de Covid-19. Sur le marché d’Ivohitra, on trouve une multitude de bêtes regroupées : des zébus, reconnaissables à leurs cornes dressées et leurs bosses, mais aussi des taureaux, des vaches et même des porcs. Qu’il s’agisse des acheteurs ou des vendeurs, tous s’accordent sur une chose : les prix sont en constante hausse.
Edmond, l’un des plus importants propriétaires de bétail sur le marché, est entouré de ses 33 bêtes. Il explique : « Le prix du plus gros zébu là-bas est de 1 700 000 ariarys. Avant, c’était entre un million et 1,2 million d’ariarys. Les coûts de la vie ont augmenté, et c’est la même chose pour le prix du bétail. Alors que les vendeurs comme moi peuvent parfois réaliser un léger bénéfice, les acheteurs sont souvent contraints de renoncer à leur achat. »
Janson, un autre vendeur sur le marché, attire l’attention avec son t-shirt orange vif à l’effigie du président sortant. Il tient à préciser que ce t-shirt ne signifie pas qu’il soutient ce candidat, mais qu’il lui a été donné par un proche vivant en ville lors d’une distribution gratuite. Néanmoins, Janson ne détourne pas le regard de l’élection présidentielle à venir. Face à l’augmentation des prix des aliments de base pour ses bêtes et à l’insécurité croissante dans les zones rurales, il promet un vote de colère.
« L’élevage souffre en ce moment, la terre est devenue sèche et nous manquons presque d’eau pour nourrir notre bétail ! Le gouvernement ne fait rien pour soutenir les éleveurs, au contraire, nous sommes exploités. Par exemple, nous devons changer le carnet de nos bovins chaque année en payant entre 12 000 et 15 000 ariarys, alors qu’un carnet devrait normalement durer cinq ans ! », s’exclame-t-il.
Martial, quant à lui, se fraye prudemment un chemin entre les différents groupes de personnes, gardant un œil inquiet sur son bétail. Nouvellement éleveur, il explique : « J’en suis encore au début de mon activité. Ce que j’attends du prochain président, c’est qu’il aide le gouvernement à nous rendre égaux aux autres éleveurs et à nous professionnaliser. En tant que citoyen, je remplirai mon devoir de vote. »
Nombreux sont les éleveurs qui ont été contraints d’abandonner leur élevage, impactés par les tumultes politiques et la pandémie. Ceux qui restent espèrent désormais un soutien à la hauteur de l’importance de cette industrie à Madagascar, où les éleveurs bovins représentent plus d’un tiers des ménages.