Les essais nucléaires français en Algérie : un long combat pour la reconnaissance des victimes
Il aura fallu près de 14 ans pour que la procédure d’indemnisation des victimes des essais nucléaires français soit enfin traduite en arabe et accessible aux résidents algériens. Entre 1960 et 1966, la France a mené 17 essais nucléaires dans le sud du Sahara, exposant ainsi plusieurs milliers de personnes aux rayonnements. Cependant, il n’y a jamais eu de recensement officiel des victimes, rendant difficile la reconnaissance de leur statut.
Depuis 2010, la loi française prévoit une indemnisation pour les personnes atteintes de maladies causées par la radioactivité. Cependant, en Algérie, cette démarche est encore peu connue. Seulement 66 dossiers de résidents algériens ont été déposés auprès du Comité français d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen), et une seule personne a été reconnue comme victime des essais.
L’association Ican-France, qui milite pour l’abolition des armes nucléaires, a fait pression sur le gouvernement français pour que les textes de la loi soient traduits en langue arabe. Enfin, cette demande a été entendue et les premiers documents sont maintenant disponibles en arabe. Jean-Marie Collin, directeur de campagne chez Ican-France, exprime sa satisfaction face à cette avancée, soulignant le manque de communication et de relais de l’information de la part des autorités françaises et de l’ambassade de France en Algérie.
La traduction en langue arabe de la procédure d’indemnisation est un premier pas, mais de nombreux obstacles demeurent pour les victimes des essais nucléaires dans le sud de l’Algérie. Il est nécessaire de prouver que l’on se trouvait à un endroit précis pendant une période précise où les essais ont eu lieu, ce qui peut être difficile pour des populations nomades. De plus, la reconnaissance des maladies causées par la radioactivité est limitée aux 23 types de cancers reconnus par la France, ce qui peut poser problème pour les victimes qui souffrent d’autres maladies liées aux essais.
Les familles des victimes se retrouvent souvent seules dans leurs démarches, tandis que l’État algérien se concentre davantage sur la question des déchets nucléaires laissés par la France dans le désert depuis des décennies. En 2021, l’Algérie a mis en place une Agence nationale de réhabilitation des anciens sites d’essais et d’explosions nucléaires français dans le sud du pays, témoignant de sa volonté de faire face à ce passé douloureux.
L’accès à la procédure d’indemnisation en langue arabe représente une petite avancée, mais il est essentiel de continuer à sensibiliser les populations concernées et à faciliter les démarches pour obtenir justice et réparation. La reconnaissance des victimes des essais nucléaires français en Algérie est une étape cruciale dans le processus de reconnaissance de leur souffrance et de leur lutte pour la vérité.